À Grenoble, un fleuriste est suspecté d’avoir à plusieurs reprises multiplié le prix des prestations demandées par dix. La victime est l’homme d’affaires Jean-Marie Messier.
En 2011, Jean-Marie Messier convient d’un accord avec un fleuriste grenoblois : toutes les semaines, celui-ci ira déposer de sa part un bouquet de fleurs chez ses parents, à Grenoble (Isère), pour 690 € par mois. Le banquier d’affaires, ancien patron de Vivendi, donne pour cela ses coordonnées de carte bancaire au commerçant. Il n’y a pas de contrat, juste une confiance. Messier précise aussi qu’avec son accord, il pourra y avoir d’autres fleurs, lors d’occasions particulières.
Les années passent, les fleurs parfument l’appartement parental. Mais en 2016, Messier reçoit, dit-il, un appel de sa banque, qui le prévient de prélèvements irréguliers sur ses comptes : ils seraient le fait du fleuriste. L’homme d’affaires et l’artisan s’accordent alors sur une reconnaissance de dettes de l’ordre de 266 825,30 €. Jusqu’à ce que le fleuriste mette un terme au remboursement. Une plainte est alors déposée par Jean-Marie Messier. Les faits jusqu’en 2014 étant dorénavant prescrits, la justice se saisit pour abus de confiance, avec un préjudice évalué à 139 274,70 €.
Chaque dimanche après-midi , le fleuriste venait livrer les parents Messier avec un bouquet de fleurs, raconte-t-il à la barre. En plus, il agrémentait les lieux de créations végétales originales. Pour le bouquet hebdomadaire, il faisait des factures, au nom de sociétés de Jean-Marie Messier. Pour le reste, il n’en faisait pas. Et l’artisan l’affirme : ce qu’il a fait lui avait été demandé, par Jean-Marie Messier ou par ses parents, et J2M était au courant, contrairement à ce qu’il dit. Décision le 24 novembre.
Le Monde – Extraits
Le vieux couple, le fleuriste et la carte bleue de Jean-Marie Messier
Un fleuriste qui travaillait pour l’homme d’affaires a comparu, mardi 10 novembre, devant le tribunal correctionnel de Grenoble, pour abus de confiance.
Tous les dimanches après-midi, le fleuriste allait, un bouquet à la main, sonner chez un couple de personnes âgées, habitant un bel et spacieux appartement de Grenoble. C’est leur fils qui le lui avait demandé : Jean-Marie Messier, actuel banquier d’affaires et ancien patron de Vivendi au début des années 2000.
La mission, raconte le fleuriste devant le tribunal correctionnel de Grenoble ce mardi 10 novembre, ne s’arrêtait pas là. Il s’agissait aussi d’aménager « les quatre terrasses de l’appartement, les murs végétalisés en orchidées de la chambre parentale, la décoration du salon », faire l’entretien du reste de l’appartement… Ou encore revenir pour Noël « avec le gros père Noël rouge » en décoration. « Tout ce travail, je l’ai fait, affirme le prévenu. Je venais chez eux toutes les semaines, toutes les semaines… »
Aux enquêteurs, Jean-Marie Messier a expliqué que cet accord avec le fleuriste prévoyait, sans contrat mais avec confiance, un bouquet de fleurs à ses parents chaque semaine pour environ 690 euros mensuels. A cela pouvaient s’ajouter d’autres dépenses si cela restait occasionnel et s’il en était averti. Pour simplifier les démarches, l’homme d’affaires avait donné les coordonnées d’une carte bancaire au fleuriste. Jean-Marie Messier était à l’époque son meilleur client, représentant 45 % de son chiffre d’affaires annuel.
Une reconnaissance de dettes
Mais, en 2016, la banque l’avertit de mouvements inhabituels : les prélèvements du fleuriste se montent, en réalité, à plus de 6 000 euros par mois. Il contacte alors le commerçant, qui s’engage, en septembre 2016, à rembourser l’intégralité de ce qui est alors qualifié de « dettes ». Montant : 266 825,30 euros.
Le fleuriste commence à rembourser, mais arrête tout. C’est alors que M. Messier dépose plainte pour abus de confiance le 22 décembre 2016. Les faits entre 2011 et 2014 étant prescrits, les enquêteurs puis la justice se limitent à la période allant de 2014 à 2016 : le préjudice est évalué à 139 274,70 euros.
Quand il est entendu par les enquêteurs, en 2019, le fleuriste évoque des « pressions » de la part des avocats de Jean-Marie Messier, qui l’auraient incité à signer cette reconnaissance de dettes. Il assure que des prestations étaient effectuées à la demande des parents Messier. « Ils étaient décédés au moment où vous êtes entendu », précise la présidente du tribunal.
Une réponse
Un fleuriste grenoblois condamné pour avoir abusé de la confiance du millionnaire Jean-Marie Messier
Reconnu coupable d’abus de confiance au préjudice de Jean-Marie Messier, un fleuriste grenoblois a été condamné mardi à un an de prison avec sursis. Le commerçant était suspecté d’avoir gonflé les factures pour des fleurs livrées aux parents de l’ancien patron de Vivendi-Universal.
https://www.ledauphine.com/faits-divers-justice/2020/11/24/le-fleuriste-grenoblois-condamne-pour-avoir-abuse-de-la-confiance-du-millionnaire-jean-marie-messier