La jardinerie Baobab, qui ne parvenait pas à joindre les deux bouts malgré l’aide de la municipalité, avait été remplacée par une autre enseigne, en avril, la Jardinerie des Flandres. Laquelle, d’après le maire d’Hazebrouck, ne paye pas ses loyers. Ces histoires pourraient coûter près de 300 000 € à la ville.
Décidément, cette enseigne de la zone de la Creule semble maudite. Il y avait d’abord eu la jardinerie Baobab, en proie à de graves problèmes financiers. La municipalité d’alors, emmenée par Jean-Pierre Allossery, avait décidé de l’aider, en rachetant le bâtiment pour un million d’euros. Des fonds publics dans un projet privé, la démarche était peu banale.
Baobab n’avait malgré tout pas réussi à reprendre racine. Des difficultés notamment attribuées, par le gérant de l’époque, au fait que le commerce soit un peu isolé, au cœur de la zone d’activités de la Creule 2 dont le développement prend du temps.
Pas de loyers depuis avril
Depuis mars, le magasin est passé entre les mains de Pierre-Antoine Giraud et s’appelle désormais la Jardinerie des Flandres. Il emploie aujourd’hui huit salariés. En août, interrogé par nos soins sur la fréquentation de l’établissement, le gérant annonçait une hausse d’environ 20 % depuis le changement d’enseigne. Tout allait bien, ou en tout cas mieux que jamais, donc, pour la boutique.
Mais voilà, le pastiche de baobab qui trône à l’entrée de la jardinerie semble toujours cacher des soucis. « On a de gros problèmes, avoue le maire, Bernard Debaecker, lorsque nous l’interrogeons à ce sujet. On ne touche pas nos loyers depuis avril et c’est 7 000 € par mois ! »
L’élu remonte le fil : « Déjà, avec l’opération Baobab, la perte pour la ville est de 230 000 € de loyers impayés. Là, depuis avril, ça fait 63 000 € de plus ! » Cela pourrait donc représenter au final près de 300 000 € de pertes… pour le contribuable.
« L’opération Baobab, c’est mort »
« À mon avis, l’opération Baobab, c’est mort, ce sera une perte sèche de 230 000 € pour la ville », tempête le maire. Pour les loyers impayés depuis avril ? « Légalement, pour l’instant, on ne peut rien demander car le crédit-bail accepté par le conseil municipal en mars n’a toujours pas été signé par le gérant. On cherche le moyen de réagir mais, pour l’instant, on est un peu démunis. »
Le maire se dit « chagriné » par cette histoire « assez compliquée. Cela fait partie de notre héritage. Je sais que l’on n’aime pas que je dise ça mais c’est bien là ! De toute façon, la première erreur, c’était de mettre un million d’euros de fonds publics dans ce commerce. Sauver sept emplois à l’époque, d’accord, mais là, ce n’était pas le rôle du maire ».
En janvier, l’ancienne municipalité avait expliqué que les impayés du temps de Baobab seraient intégrés dans le prix de la location-vente. Que ce nouvel investisseur « épongerait » les dettes, en somme. Rien n’est moins sûr à ce jour.
«Il manque un papier de la mairie»
Hier, Pierre-Antoine Giraud, le gérant de la jardinerie, ne voyait pas d’un très bon œil que nous mettions ce sujet sur la table. Selon lui, s’il n’a toujours pas signé le crédit-bail, et par ricochet pas payé les loyers, c’est à cause de longueurs administratives, imputées notamment à la municipalité, selon lui : « Il manque un papier de la mairie, que le notaire attend toujours. » Pierre-Antoine Giraud assure : « Au moment de la signature, on réglera d’avril à décembre. »
Là encore, la version de la mairie est tout à fait différente, ou presque. « M. Giraud a raison lorsqu’il dit qu’il lui manque un document. Il s’agit de l’acte notarié du crédit-bail. Ça traîne parce que, depuis avril, M. Giraud négocie et renégocie des points. Et il a raison de dire qu’il ne peut pas payer si ce n’est pas signé, concède-t-on à la mairie. Mais ce que M. Giraud oublie de dire, c’est que face à ce vide, nous lui avions demandé de faire une attestation de reprise de l’ancien bail et ça, il ne l’a pas fait. » Cette attestation aurait permis, d’après la mairie, « que soient payés les loyers de façon provisoire », en attendant le fameux acte notarié.
Hier, le notaire de Pierre-Antoine Giraud, basé en Île-de-France, nous expliquait quant à lui : « Si les deux actes n’ont pas été régularisés à ce jour (l’acquisition d’un fonds de commerce et la régularisation du crédit-bail), cela s’explique par les délais résultant des échanges entre les parties en vue d’aboutir à des projets dans des termes validés par chacune des parties (…). À ce jour, l’absence de signature s’explique par un dernier document à fournir par la commune d’Hazebrouck. » Autrement dit… on tourne autour du baobab.
Le bâtiment devrait être racheté
Le bâtiment appartient toujours à la ville, qui l’a acheté en 2010, au prix d’un million d’euros, pour aider Baobab, alors en redressement judiciaire. Quid de ces locaux aujourd’hui ?
Ils devraient être rachetés par le repreneur, à l’issue du crédit-bail. Avec ce genre de montage financier, l’entreprise peut en effet devenir propriétaire du bien à l’échéance du contrat (qui est de quinze ans en l’occurrence) : les redevances déjà payées viennent en déduction du montant d’acquisition.
Si cette option ne devait pas aboutir, eh bien la mairie devrait soit garder les locaux, soit les revendre, « mais à qui et dans quelles conditions financières ? Quel devenir pour ce bâtiment avec une grande verrière ? », s’interroge déjà le maire, Bernard Debaecker.