Philippe Lefrancq est le prototype du self-made-man. En moins de 20 ans, il a su faire de Florajet l’un des leaders de la livraison de fleurs.
Si vous voulez agacer Philippe Lefrancq, fondateur et président-directeur général de Florajet, parlez-lui actionnaires. Des partenaires qu’il ne veut pas voir pousser la porte de son entreprise : « C’est plus facile d’avoir des financiers derrière, sauf qu’ils vont vouloir compresser les salariés, délocaliser… »
Alors Florajet, c’est lui et seulement lui. Dans son entreprise, il se dit « comme un moine dans son monastère ». Mais aussi comme un homme « en vacances », tellement « travailler est une passion ».
Philippe Lefrancq ne semble faire que ça. Il passe bien un peu de temps au volant de sa grosse Audi, il adore ce constructeur allemand, mais c’est surtout pour « le boulot ». Notamment pour rendre visite à des fleuristes, des gens qui font « un métier très dur ».
Il pourrait se payer des voyages mais il n’a pas la bougeotte, il pourrait s’offrir un yacht mais en mer il a « mal au cœur ». Alors pour se détendre, il pilote des quads dans la campagne vauclusienne, près de chez lui. Et il bosse.
Plutôt instable à ses débuts dans la vie professionnelle, il a trouvé sa voie en ouvrant une boutique de fleurs, en 1988 à Pertuis (Vaucluse), qu’il avait payée 50 000 francs. Aujourd’hui, il consacre chaque année des millions d’euros à la communication, dont des spots télé « qui coûtent cher », mais sont indispensables, et au référencement de Florajet sur le net.
Internet, parlons-en. Manifestement la deuxième révolution de sa vie. Tapez Florajet sur un moteur de recherche, comme 12 millions de personnes l’ont fait l’an dernier, et un monde de fleurs s’offrira à vous. « On livre des émotions », résume ce PDG 2.0 : « Pour un mariage, pour un anniversaire, ou pour un deuil ; d’ailleurs, quand exceptionnellement un bouquet n’arrive pas dans les temps, ça prend des proportions terribles car on est dans le registre de l’émotion. Alors je vais voir le fleuriste pour savoir pourquoi. »
La première révolution de sa vie a été le fax. Bienvenue à l’âge de pierre. Dans sa boutique, cet entrepreneur besogneux a très vite mesuré combien « tout magasin de fleurs a besoin d’un réseau de transmission florale : il fallait une demi-heure pour transmettre une commande, à l’époque, c’était très compliqué et il fallait délaisser ses propres clients pour s’occuper de cette commande. »
Et c’est ainsi qu’en 1992, il a inventé “la transmission florale par fax centralisée”. Sauf que seuls 5 % des fleuristes étaient alors équipés d’un télécopieur. Philippe Lefrancq a donc pris son bâton de pèlerin pour vendre sa trouvaille. Mais il a fallu convaincre les fleuristes et leur prouver que l’avenir n’était pas ailleurs.
Vingt-trois ans plus tard, Florajet, c’est deux plateaux téléphoniques implantés en France, à Cabrières-d’Aigues (Vaucluse) et à Nîmes (Gard). Et Philippe Lefrancq de préciser : « C’est pour ça que je ne veux pas de financiers, Florajet est une société franco-française. »
À son réseau de 5 500 fleuristes, il impose la forme des bouquets ainsi que les couleurs et les fleurs prédominantes. Histoire de coller au catalogue à la disposition du client, dans les boutiques ou sur le site Florajet.
Voici, avec une authentique chaleur humaine, les clefs de la réussite de Philippe Lefrancq.
Mais ce père de deux filles de 26 et 28 ans, qui travaillent à ses côtés, se la joue modeste. Même quand il tend le “Who’s who” à ses visiteurs. C’est qu’il figure dans cette bible des gens qui comptent en France.
De quoi rendre fier le plus grand des modestes.
